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Le patrimoine musical de Notre-Dame de Paris


Jean Fouquet (vers 1420-1478 ou 1481), la descente du Saint-Esprit [Public domain] - la cathédrale Notre Dame au Moyen-Âge


Le désastre qui a touché récemment ce grand édifice a frappé les esprits et, au-delà des donations en vue de sa reconstruction, l'intérêt des Français s'est focalisé sur sa place dans l'histoire et dans l'inconscient collectif : au XIXème siècle la littérature1) avait ramené Notre-Dame au premier plan et l'avait sauvée de la démolition car l'édifice menaçait ruine.

Ensuite Prosper Mérimée, l'écrivain, également inspecteur général des Monuments historiques, chargea l'architecte Viollet-le-Duc de sa restauration : ce dernier ajouta la flèche, qui n'existait pas à l'origine, conformément à ses théories sur l'architecture. la cathédrale idéale, d'après Viollet-le-Duc

Depuis un siècle, le septième art a pris le relais et Notre Dame a figuré dans pas moins de huit films, d'après le Huffington Post.

Le grand orgue qui a pu être sauvé a attiré l'attention du public sur la musique à Notre Dame ; la musique de Notre Dame devrait-on écrire. En effet, depuis le Moyen-Âge, des chantres, des musiciens, ont composé dans ce cadre majestueux.

L'école de Notre-Dame

Dans ce que les spécialistes appellent l'école de Notre-Dame la polyphonie a fait ses premiers pas, musique religieuse écrite par des compositeurs ayant exercé entre les douzième et treizième siècles à la cathédrale Notre-Dame de Paris ; l'expression fait par ailleurs référence à de nouveaux styles, des innovations majeures créées par les chantres et les chanoines de la cathédrale parisienne. Le rayonnement de l'Université de Paris au Moyen-Âge est tel qu'on y vient de toute l'Europe et les clercs rentrent chez eux avec un bagage théologique conséquent, mais souvent également musical, contribuant ainsi à la diffusion dans toute l'Europe du répertoire de l'École de Notre-Dame.

Le Magnus Liber Organi de Graduali et Antiphonario, soit Grand livre de l'organum sur le Graduel et l'Antiphonaire, était un manuscrit où se trouvait noté le vaste répertoire de la cathédrale. Il était placé sur un lutrin, au milieu du chœur lors des cérémonies. Il fut souvent copié partiellement ou intégralement et diffusé partout en Europe. On considère qu'il s'agit du premier corpus polyphonique écrit et non transmis oralement.

La notation de la musique de la fin du XIIe siècle se fait sur quatre ou cinq lignes. Généralement les clés sont d'ut ou de fa. Les notes sont réduites au carré ; les notes longues sont figurées par un rectangle plus ou moins allongé. Les groupes neumatiques sont séparés par des traits verticaux et une double barre indique la fin du morceau. Pour les altérations, on trouve l'indication du bémol, du bécarre et, courant XIIIème siècle, apparaît le dièse.
Les musiciens de Notre-Dame ont orienté une grande partie de l'avenir de la musique occidentale. En particulier deux chantres des XIIème et XIIIème siècles sont restés célèbres : Léonin et Pérotin.

Quelques créations populaires postérieures

Citons pour mémoire le O Filii et filiæ (1494) ou la prose parisienne de la Dédicace de Notre-Dame, Jerúsalem et Sion fíliæ (milieu du XIIème siècle, recomposé au XVIIIème siècle), dont une interprétation magistrale a été enregistrée par la Maîtrise de la cathédrale, sous la direction du chanoine Jehan Revert, Pierre Cochereau étant à l'orgue, dans le cadre des grandes heures liturgiques de Notre-Dame de Paris. Ces deux pièces, de nos jours chantées dans une multitude de langues, ont fait le tour du monde.

Décadence et renaissance

Au XVIIIème siècle la grande musique d'église, patronnée par les princes, suit la mode et devient concertante, lyrique, opératique, bref davantage adaptée au concert qu'au recueillement spirituel. En même temps le chant grégorien était tombé dans une déliquescence marquée, engendrée par des réécritures malencontreuses, postérieures au Concile de Trente, des mélodies grégoriennes originales.

Après l'épisode révolutionaire et le premier empire, si la vieille cathédrale menaçait ruine, la musique ne valait guère mieux et ce fut grâce à des personnalités musicales éclairées, comme Boëly à l'orgue de St Germain l'Auxerrois, qui introduisit la musique de Jean-Sébastien Bach en France, et à l'abbé de Solesmes Dom Guéranger qui put lancer le mouvement de restauration du chant grégorien, qu'une réflexion sérieuse sur la musique liturgique s'engagea.

On était au XIXème siècle et la civilisation industrielle accomplissait des prouesses impensables autrefois : l'arrivée d'Aristide Cavaillé-Coll à Paris révolutionna la facture d'orgue et il fallut, dans un premier temps, que les meilleurs organistes jouâssent leurs compositions en les adaptant à des instruments déjà qualifiés de symphoniques. Mais rapidement l'école française d'orgue va renaître et se développer et des musiciens de grand talent vont maîtriser ces machines sonores et en exploiter toutes les possibilités.

Le grand orgue de Notre-Dame de Paris fut reconstruit en 1868 par Aristide Cavaillé-Coll et, parmi les titulaires de cette tribune prestigieuse, au premier chef figure Louis Vierne dont la quatrième symphonie, composée en 1914, semble prémonitoire par rapport à la guerre qui suivra… mais peut également évoquer l'incendie de Notre-Dame. Parmi les organistes, contemporains amis et elèves de Louis Vierne, tous grands compositeurs, on relèvera Marcel Dupré qui était son assistant, Charles-Marie Widor, Maurice Duruflé qui fut également son assistant, Charles Tournemire, et bien d'autres.


1)
Notre Dame de Paris, de Victor Hugo
infos/news/musique_notre_dame.1556932630.txt.gz · Last modified: 2019/05/04 01:17 by admin